Baisse des prix du pétrole : attention aux effets indésirables !

En janvier dernier, les prix du pétrole ont atteint leur point bas depuis 12 ans. Une situation qu’Euler Hermes évalue en majorité due à une offre excédentaire (à 60%), suivie d’une décrue de la demande, notamment liée au ralentissement chinois (à 30%), et à des spéculations (10%).

​« Nous estimons un prix du baril à 38 USD en moyenne annuelle en 2016. Cette faiblesse record des cours sur une longue période s’explique essentiellement par des facteurs structurels » analyse Ludovic Subran, chef économiste d’Euler Hermes. « Au-delà des bénéfices certains sur le pouvoir d'achat des ménages et les marges des entreprises pour les pays importateurs comme la France, la situation est inquiétante pour un certain nombre de pays et d’entreprises, qui risquent d’être fortement fragilisés, pesant in fine sur la croissance mondiale ».

La fragilisation des pays dépendants de l'or noir

En fonction du modèle économique en place, certains pays paient la baisse des cours au prix fort. L'écart entre les pays « gagnants » et « perdants » s'est creusé : alors que l'Inde pourrait gagner 0,25 point de PIB cette année, le Venezuela perdrait 3,4 points.

  • Les comptes courants subissent souvent une dégradation considérable. Selon le régime de change du pays, certains pays exportateurs nets deviennent débiteurs nets, l'impact sur la balance courante pouvant alors atteindre -20 points de PIB depuis 2014 (-26pp pour l'Arabie saoudite et le Venezuela entre 2014 et 2016, par exemple).

  • La dépréciation des monnaies et le recul d’une marge de manœuvre budgétaire aboutissent à une augmentation du risque de crédit ;

  • Enfin, l'inflation et la dégradation des équilibres budgétaires pourraient attiser les tensions dans les pays où la manne pétrolière sert à acheter la paix sociale. Les pays en proie à une inflation massive (Venezuela), ou bien ceux où la cohésion sociale est fragile (pays africains, Russie, Algérie) risquent davantage de connaître des troubles sociaux.

La fragilisation des entreprises exposées au cours du Brent

Les entreprises seront affectées à des degrés divers, selon les choix politiques passés et présents. Certaines peineront à payer leurs fournisseurs internationaux en raison de la dépréciation de la monnaie ; d'autres feront face à la mise en œuvre d'une fiscalité agressive visant à compenser le manque de marge de manœuvre budgétaire ; enfin, un troisième groupe subira de plein fouet une récession liée à l'effondrement de la consommation.

Les secteurs de l’énergie et des machines sont les victimes directes de cette période prolongée de faiblesse des prix du pétrole : plus de 200 milliards USD d'investissements perdus dans le secteur pétrolier ! Construction et distribution en subissent les dommages collatéraux. Pressées de réduire leurs coûts sur fond d'incertitude quant à leur rentabilité future, les entreprises ont dû réduire leurs dépenses d'exploration et de production, ce qui a entraîné une forte baisse des investissements en 2015. Une tendance amenée à perdurer en 2016.