La collecte et l’analyse des comptes sociaux constituent le minimum qu’un financier d’entreprise puisse faire quand se pose la question d’un crédit à accorder à un client. Le calcul des ratios habituels (rentabilité, cash-flow, gearing, DSO/DPO…), va de soi. Reste à se procurer les comptes, ce qui n’a rien de bien compliqué tant les sources d’information financière sont abondantes, y compris via des services en ligne ouverts à tous.
On y trouve les comptes sociaux et consolidés publiés (toutes les entreprises n’y sont pas soumises, voir plus bas), l’historique de l’entreprise, les noms des mandataires sociaux et des actionnaires, et la structure juridique. Ces informations ont l’avantage d’être exactes – elles s’appuient sur les documents déposés au Greffe. Et enfin : elles sont gratuites, ou presque !
Malgré ces avantages, les comptes sociaux et leur analyse sont loin de constituer des alliés sûrs pour celui qui doit décider du montant maximal d’encours accordés à un client.
Une disponibilité qui n’est pas acquise
Jusqu’à la loi Macron, beaucoup d’entreprises faisaient le choix de payer l’amende de 1500 € (et 3000 € en cas de récidive) plutôt que de déposer leurs comptes. Elles estimaient ainsi que le secret des affaires valait bien cette somme. Certains observateurs avançaient alors que 20 à 50% des dirigeants ne déposaient pas leurs comptes.
Depuis la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, la confidentialité des comptes est devenue possible aux entreprises qui répondent à au moins deux des caractéristiques suivantes :
- CA < 8M€
- Total du bilan < 4M€
- Nombre de salariés employés au cours de l’exercice < 50
En 2017 pas moins de 46,2% des liasses déposées aux greffes ont opté pour la confidentialité de leurs comptes, contre 36,4% en 2016 (source Infolegale). Non publiés, les comptes de près d’une entreprise sur deux en France sont donc indisponibles pour leurs créanciers !
Les assureurs-crédit bénéficient d’un accès confidentiel à ces données déposées, mais non publiées. Ils peuvent ainsi les prendre en compte dans leurs évaluations, et donner leur avis dans des délais très brefs. Ce dernier point est important car, accélération des affaires oblige, la décision de crédit doit pouvoir être prise rapidement par un fournisseur pour finaliser une affaire.
Obsolescence… programmée !
L’autre problème clé tient dans le décalage temporel entre les faits et les chiffres. Les comptes annuels doivent faire l’objet d’un dépôt au greffe du Tribunal de Commerce dans le mois qui suit la tenue de l’assemblée générale d’approbation. Soit un délai de publication qui peut aller jusqu’à 7 mois à compter de la clôture de l’exercice !